altitude : 2260m

Aujourd’hui, après un petit déj de roi dans notre hôtel de luxe (on rencontre même 2 français en vacances dans le coin car ils ont « de la famille à Bichkek » … comment peut on avoir de la famille à Bichkek???), grande journée de route pour rejoindre par les pistes le lieu de notre campement… Et oui, on s’installe pour 2 nuits en camping sauvage dans une vallée d’altitude (au moins 3000 m).
Le programme initial prévoyait une nuit au point A, puis une grande randonnée en montagne avec 700 m de dénivelé pour rejoindre – via le lac Techik kol  - le point B (donc un peu plus haut dans la vallée), à l’endroit où Altimbeck nous aurait attendus avec la voiture et les tentes pour dresser le 2ème campement. Vu les capacités sportives du groupe (il est vrai qu’à 3500 m on est encore moins vaillants que d’habitude), Oulan nous propose de nous poser directement au point B pour 2 nuits, et de faire à partir de là une balade à la journée pour rejoindre le lac Techik kol. On accepte tout de suite la proposition, et c’est parti ….
On longe tout d’abord sur une route à peu près carrossable, une large vallée toute occupée aux travaux des champs : on est en plein dans les foins ! (il faut dire que les citadins ont aussi l’occasion de s’occuper à ces saines activités : comme c’est samedi, ils font des corvées d’entretien des fossés de la ville de Naryn, à tour de rôle. Cela doit renforcer le lien social et diminuer les impôts – enfin j’imagine…. En plus c’est bio car tout se fait à la serpette et à l’huile de coude).
Mais revenons à notre road trip du jour … à la fin de cette vallée civilisée, on rejoint une piste (la piste N°13 du bouquin Kirghistan off road, pour ceux qui auraient envie de la refaire une jour), on traverse un « petit pont de bois » (private joke) légèrement branlant – on s’est quand même assurés qu’une famille de 20 personnes dans leur mini bus perso, en route pour un pique nique montagnard – passait sans encombre ; et pour faire bonne mesure on a confirmé l’info avec le passage d’un troupeau de vaches. Ces vérifications faites, on cherche notre chauffeur Altimbeck, qui a pris de la hauteur pour capter le réseau téléphonique. C’est alors qu’on apprend que depuis le milieu de la nuit, il n’a pas dormi, étant en lien permanent avec son village et sa ferme : en effet, son fils de 15 ans, certainement occupé à gagner des vies sur un jeu vidéo, n’a rien trouvé de mieux que de laisser d’échapper le troupeau de 50 moutons dont il avait la garde. Et d’après Oulan, c’était des moutons très beaux et très chers (au total pour le troupeau 1000000 soms soit environ 10000 euros, une fortune quand on sait que le salaire mensuel moyen est de 250 euros). Bref, c’était la panique chez Altimbeck (je n’imagine pas ce que le gamin a du entendre ….), il a mobilisé tout le village une partie de la nuit et de la matinée, les uns et les autres communiquant par whatsapp pour s’informer de l’avancée des recherches, et enfin vers 10H du matin, Hourrah Halleluya (ou plutôt Bismillah), les moutons ont été retrouvés à 10 km de là, au complet et certainement très ravis de leur petite escapade. Du coup Altimbeck est soulagé mais plutôt dans le coaltar ce matin ( plusieurs fois, au volant de son bolide, je l’avais vu se frotter les yeux et je m’étais dit « tiens, c’est comme moi quand je suis hyper fatiguée », mais ça s’était avant que je ne connaisse l’histoire de moutons vadrouilleurs).
Mais je m’égare, on passe donc ce magnifique pont de l’ère pré-soviétique, et on s’engage dans une piste qui s’élève en longeant une rivière. Comme toute les rivières kirghize, elle est d’une magnifique couleur d’un turquoise laiteux (c’est la description la plus proche que j’aie trouvée…). On passe le village de « petite Naryn », au milieu des champs de trèfle et de colza. Oulan nous explique plus tard que le gouvernement envisage de noyer cette vallée en construisant un barrage, ce qui permettrait au pays de diviser par 2 sa consommation de charbon (et un autre barrage est aussi prévu dans une autre vallée pour la stopper totalement).
Le 4X4 s’arrête et on fait une petite partie de piste à pied pour se dégourdir les jambes, c’est l’intérêt d’avoir un chauffeur, puis on continue en passant encore quelques uns de ces ponts d’allure branlante – en fermant les yeux à chaque fois (en tout cas pour moi) –. Finalement la vallée s’ouvre, on surplombe quelques fermes, et on décide de se poser dans la pelouse pour le pique nique. Altimbeck en profite pour piquer un petit roupillon, pendant que nous allons explorer les berges de la rivière, puis nous commençons à pique niquer. Le soleil tape assez fort, il n’y a pas d’ombre, je démarre une petite sieste dans l’herbe quand le coup de tonnerre quotidien de midi se fait entendre. Il n’y aura pas de pluie, mais cela suffit pour nous faire remballer tout le matos, surtout que la route est encore longue.
On continue donc plein Est (comme depuis ce matin), passons à côté de plein de yourtes et de troupeaux – ça commence à devenir habituel – et en milieu d’après midi parvenons enfin à l’emplacement de notre campement … une douce et verte vallée surmontée de hautes montagnes aux roches de couleurs, et de glaciers, et parsemée – comme d’hab – de troupeaux de chevaux et de vaches, et de nids de marmottes. Les tentes sont vite installées, on fait un goûter de pastèque (excellente), puis une petite sieste (l’altitude aidant, le mal de crâne m’a repris), pendant qu’Oulan se met à préparer le repas du soir : un excellent Plôv = plat de riz et viande avec des oignons et des carottes, le tout mijoté longuement sur le réchaud de camping !
Dernière observation des troupeaux, qui sont un peu embêtés qu’on squatte leur territoire, puis dodo (il ne fait pas encore nuit).
La nuit sous la tente ne sera pas froide… on ne dirait pas qu’on est à 3000 m !